19 février 2011

Je suis un no man's land

Après un premier long-métrage, Les Invisibles, Thierry Jousse, ex rédacteur en chef des Cahiers du cinéma, signe un deuxième film en compagnie du chanteur Philippe Katerine, déjà figurant dans d'autres projets précédents du cinéaste.
Le récit est celui de ce personnage que l'on connait déjà, ce chanteur un poil déjanté, qui suite au concours d'évènements bizarres retrouve ses parents délaissés depuis l'adolescence et trouve l'amour de sa vie au gré de promenades nocturnes en forêt... Autant le dire : si vous ne parvenez pas à adhérer à la personnalité du chanteur, fuyez ! Bien que Je suis un no man's land ne se propose pas comme un documentaire sur Philippe Katerine, son personnage est une sorte de double de fiction. La première séquence du film coupe net le chanteur lors de son arrivée sur scène : Jousse prévient ainsi son spectateur qu'il ne sera pas question du chanteur, mais bien d'une réelle plongée dans la vie singulière de ce personnage qui nous est déjà un peu familier.
Je suis un no man's land est une bonne surprise. Désavantagé par son accueil mitigé dans la presse, boudé par les spectateurs, pourtant le film de Thierry Jousse est empreint d'une douce folie assez communicatrice. Il y ressort une belle envie de création, ou de re-création d'un monde déjà existant, prise en main par ce protagoniste loufoque mais tendrement attachant. Déluré, le scénario ne perd pas l'atmosphère qu'il parvient à instaurer dans une première partie de jeu, hilarante, qui confronte l'artiste à une fan psychologiquement atteinte. Sans tomber dans le piège d'une comédie musicale facile, c'est plus la forme d'un conte qu'adopte le réalisateur. A travers ses références populaires (le costume type magicien d'Oz, la forêt, la route infernale qui empêche de repartir, les clichés de campagne...) et l'envergure sentimentale (relation parents / fils), Jousse propose un film ovni, sorte de no film's land, qui séduit en parvenant à nous convaincre de l'incroyable. A l'image de la scène de la chanson nostalgique, unique travelling qui se conclue sur l'être perdu, le réalisateur propose une palette d'émotions dont la force est de rester sans cesse instable.
Cependant, presqu'à l'évidence, Je suis no man's land faute quelques fois, notamment sur sa photographie assez criarde, que le numérique ne parvient pas à avantager. Les quelques séquences de nuit sont les plus réussies – le duo Katerine / Depardieu fonctionne parfaitement - et reposent les yeux dans de belles teintes sombres au dominantes vertes. Le personnage de l'ami d'enfance peine lui aussi à trouver sa place, seul personnage véritablement terre à terre, décentré de cette sphère onirique dans laquelle semble être confiné tous les autres. Techniquement inégal mais joliment unique, Je suis un no man's land propose l'immersion sans être un dénonciateur de cinéma hermétiquement décalé. Simple, peut-être un peu trop, ce film donne malgré tout l'envie d'être défendu. C'est sans doute le mieux que l'on pouvait en attendre.


Réalisé par Thierry Jousse
Avec Philippe Katerine, Julie Depardieu, Aurore Clément
Film français | Durée : 1h32
Date de sortie en France : 26 Janvier 2011

6 avis gentiment partagé(s):

neil a dit…

J'avais un avis un peu mitigé. Certaines séquences m'ont touché (notamment les scènes avec les deux parents) mais l'ensemble ne prend pas vraiment je trouve...

Jérémy a dit…

C'est vrai qu'il est difficile d'adhérer totalement à ce film.
Personnellement, je n'ai pas eu trop de mal. Mais le film reste contestable, oui.

heavenlycreature a dit…

Comme neil, j'ai surtout été touché par les parents dans ce film, Aurore Clément y est très touchante... sinon, c'est vrai que sa douce folie en fait un film plutôt attachant.. même si ne m'a globalement pas vraiment marqué.

Jérémy a dit…

Je ne pense pas que le film me marquera non plus...
Mais je ne peux pas nier qu'il m'a plus ou moins charmé. Je suis ressorti le sourire aux lèvres. Alors au risque de me faire insulter, frapper voire tuer (les critiques sur le film sont très virulentes, j'ai peur !), je ne crache pas dans la soupe tout de même.

Yohan Granara / Raphael K a dit…

Bon j'ai pas raté le film du siècle alors =). Quoique ta critique me fasse quelque peu regretté de n'y être point allé mais ce n'est pas non plus la fin du monde ! ^^. Au plaisir de te lire !

Christophe a dit…

Le pire film de ce début d'année pour moi... J'ai carrément renoncé à lui donné une note !

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